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EL HIERRO

 

El Hierro est l'île la plus à l'ouest, la plus discrète, la plus sauvage, la plus écolo, la plus volcanique, la dernière de l'archipel avant de partir au Cap vert ou vers le continent américain. En fait, la première petite île que nous avions abordé en septembre, La Graciosa, fait partie de Lanzarote. El Hierro est la plus petite des sept îles des Canaries. Ile volcanique dont la dernière éruption date de 2011-2012. El Hierro est peu touristique car n'offre que peu de plages de sable noir. Par contre, elle regorge de belvédères dont le pico le plus haut s'élève à 1500m. Elle est, donc, appréciée des randonneurs mais aussi des plongeurs. C'est un spot pour les passionnés de plongée car, au sud, il y a la réserve sous-marine. Tous ces atouts nous attirent, Pierre et moi! Mais il faut d'abord naviguer jusque là. Ça dépote!

Coin pour les voileux:

Comme souvent, nous profitons d'un vent de nord-est. Seulement 44 miles nautiques. On prévoit 8 heures de navigation. Pierre n'aime pas se traîner, il préfère la vitesse! Chaque centimètre de voilure est exploitée, chaque souffle de vent est optimalisé, c'est donc en 6h30 que, les cheveux ébouriffés, nous clôturons la navigation au bout de l'archipel! A 10h15', on sort du port San Sebastian de La Gomera, il y aura du vent, en prend deux ris dans la GV d'emblée, mais le génois tout déployé. Une fois écarté de La Gomera, vers 12h30, à nouveau l'effet de tuyau entre les îles, le vent forcit à 30 noeuds, rafales à 39! On enroule, alors, le génois pour sortir la trinquette. Là, c'est confortable. C'est du Rock'n Roll durant quatre heures. En s'approchant de l'île El Hierro, moins de vent ( 20 noeuds) mais toujours de la houle. Nous sommes à l'entrée du port La Estaca. Clac-clac, on enroule la trinquette, on affale la GV et à la fin de la manoeuvre: un vrai "CLAC" ! A nouveau souci avec le système qui enroule la GV, pas au cordage  (la bosse de ris ou d'enrouleur) mais le ressort du spinlock qui éclate. 

Le Spinlock sert à bloquer une drisse, une écoute etc (des cordages).

Dans ce port, on doit annoncer à la radio notre arrivée, c'est la police portuaire qui répond et qui nous dit où s'amarrer. Et puis voilà, "time", terminé, à nous de nous débrouiller pour l'amarrage. Pas de marinero, pas de gestionnaire, ce n'est pas un port privé. Comme il y avait beaucoup de vent, la police du port nous a dit de s'amarrer au grand quai en entrant, sur la droite. Personne pour nous aider, on a bien géré. Puerto de La Estaca se situe en bas d'une falaise, il n'est pas très grand, quelques pontons flottants, un grand avant-port pour le ferry qui vient de Ténériffe 2X/ jour. On y sent une atmosphère de bateaux de grand voyage: ils sont tous équipés de panneaux solaires ou d'une éolienne, de tas de rangement coincés sur le pont ou à l'arrière. La plupart se prépare pour une traversée, ils attendent la bonne fenêtre météo.
Donc ici, aucun magasin, aucun resto, juste le terminal du ferry et son grand parking. Pour visiter l'île, nous optons pour la location voiture car la gua-gua ( le bus) a peu de flexibilité.
Chaque matin, nous avions un spectacle de lever de soleil magnifique:


En bord de mer, partout autour de l'île, c'est lumineux, soleil tout plein. Quasi tous les jours, à quelques kilomètres, parfois 2km seulement, le paysage est dans le brouillard. A ces altitudes-là, la végétation, la forêt est bien verte, dense, humide. Encore plus en altitude, les sommets se dégagent en cours de journée, s'il y a du vent. La chaleur de l'océan s'évapore sous la chaleur, forme les nuages qui s'accrochent, sont captés par un relief d'altitude. S'il n'y a pas de vent, aucune chance que le relief se dégage.

Notre premier matin, nous sommes réveillés en sursaut, à 7h, il fait encore tout noir. J'entend une voix de femme qui me semble SUR notre bateau?!?! Je fonce vers la fenêtre et je vois un voilier qui s'est "accroché" au nôtre. On appelle cet amarrage: "se mettre à couple". Pierre saute de son lit, sort pour comprendre et voir si tout va bien. Ce sont, en fait, des Norvégiens, arrivés de nuit dans ce port qu'ils ne connaissent pas, en ayant une hélice d'étrave en panne, sans aide, ils veulent s'amarrer le long du quai car peu de manoeuvre à faire mais Crok'n Roll est là. Donc, ils installent leurs amarres sur notre bateau. 
Cette situation n'a duré que quelques heures, en fin d'après-midi, nous étions chacun dans un catway.


Avant de se lancer dans l'exploration de cette île lointaine, on fait nos devoirs. Pierre voudrait réparer au plus vite son système pour enrouler la grande voile ( GV) car il doit couper le cordage, qu'il avait réparé il y a quelques semaines, pour ôter le système de bloquage ( le spinlock). Puis, refaire une épisure au cordage pour le remettre en boucle. 






C'est la 2ème fois qu'il fait une épissure, c'est plus rapide, il connait la chanson.


Je profite du vent: super séchoir ultra rapide!


Et puis, sereins, la visite insulaire commence par la capitale: Villa Valverde. Petite ville à 600m d'altitude, formée de quelques maisons colorées, en terrasses car agrippées à la montagne. Mais rien d'exceptionnel, d'autant plus que la brume se lève seulement, il fait carrément très frais.


El Hierro est la dernière-née de l'archipel ( environ 1,1 millions d'années) et la plus volcanique car elle contient 500 cônes parsemés d'un bout à l'autre , 300 autres enfouis sous les coulées de lave pétrifiées, 70 tunnels de lave ont été découverts, dont un de 6 km de long! Nous commençons la marche par une des rares balade sans dénivelé, puisque c'est en bord d'océan. La plus facile: "La Maceta"- 2h.
Le contraste du noir de la lave avec ce bleu clair, c'est superbe!


Quelle hostilité ces volcans.

Hôtel " Puntagrande" mythique de l'île, léché par les vagues.

"la Maceta" est bien balisée munis de coins de repos ombragés ( rareté!), offrant souvent de jolies vues. 

La grande particularité de l'île est "el Golfo": un énorme amphithéâtre taillé dans la montagne par un immense glissement de terrain, suite à l'érosion. On croirait un cratère qui s'est ouvert vers l'océan. Des sentiers de crêtes ravissent les randonneurs et proposent des tas de "miradors"( de Bascos, de Jinanna), et  celui de "la Peña, à l'Est d'El Gofo. Une oeuvre de César Manrique ( qu'on aime tant depuis la visite de Lanzarote) créée en 1989. Avec une vue panoramique vertigineuse sur la plaine de El Gofo. Là, les falaises font plus de 1000m de haut, c'est très impressionnant! On a pu assister au coucher du soleil, entre les nuages....
Cette vue est prise depuis le mirador de Peña, extrémité orientale du golfe.

La balade à El Hierro est directement dans la dénivelé. Aucun sentier n'est facile. 260 km de sentiers sont très bien organisés en 15 circuits de différents niveaux, tous très bien balisés. Et le GR 131. Plusieurs fois durant notre séjour, nous aimerions profiter d'une rando sur la crête. Dans cette forêt dense, il fait bon voir frais. Malheureusement, jamais de chance, nous sommes à chaque fois dans les nuages. 

Quelle déception! Pas de vue panoramique sur l'océan et la plaine du golfe!


Dans la plaine du golfe, région la plus fertile de l'île, il y a les gros villages tels "La Frontera", "Tigaday," un petit bourg en bord d'océan, "Pozo de la Salud",  avec un petit resto qui ne paye pas de mine mais qui maitrise à la perfection la cuisson du poisson, en grillade. Un délice! Des piscines naturelles dont la plus chouette "Charco Azul" nous a bien amusés. Il faut s'y rendre à marée basse quand l'océan se retire et laisse place au bassin naturel dans la rocaille. On y observe des poissons et des crabes qui attendent la prochaine marée pour s'échapper. 



  
Pas très à l'aise avec les crabes sur les rochers car j'ai oublié mes chaussures de rivière.....


Et, surtout, il y a "l'ecomuseo de Guinea": un écomusée en plein air. C'est un ancien hameau restauré et agencé pour témoigner et expliquer la vie des aborigènes. On peut se promener dans les ruelles entre la petite quinzaine de maisons. A côté, il y a le musée du lézard noir de El Hierro, protégé, redécouvert en 1974. Le plus grand mesure 20 cm. 


Complètement inoffensif. Il ressemble à un iguane.


Côte ouest. Impensable de faire l'impasse à l'hermitage qui conserve l'image de la patronne de l'île: Nuestra Señora ( ou Virgen) de los Reyes. Petite chapelle blanche entourée d'un mur blanc, toute simple,  loin dans la montagne. Des bergers habitent encore dans des trous dans la roche, pas loin de la chapelle. 


La vierge entourée des trois rois mages.



De là, on emprunte une piste carrossable jusqu'à El Sabinar. Nous sommes dans la réserve naturelle Mencafete. La région de El Sabinar sont des pentes qui dominent l'océan peuplées de genévriers endémiques ( des sabinas) courbés jusqu'au sol, avec des troncs torsadés, diformes, noueux à cause du vent du nord-est constant qui dévale ces pentes jusqu'à l'océan. Etrange mais beau!
Nous n'irons pas plus loin car le brouillard est présent....grrr!


  Il y a, bien sûr, des sentiers de rando qui mènent au mirador de Bascos. Belvédère qui domine El Gofo depuis son extrémité occidentale. Comme à l'autre extrémité ( mirador de Peña), la vue dépend du brouillard. Le point culminant de l'île est: le Malpaso , qui signifie "mauvais pas", à 1501m d'altitude. Nous n'avons pas pris le temps d'en faire l'ascension. Pour une prochaine fois?? Hé hé :-)

Au sud, il y a le village de la Restinga. Au bord de la réserve maritime de la "Mar de las Calmas". C'est un endroit hyper fréquenté par les passionnés de plongée sous-marine. Un spot, comme ils disent. A El Herrio, seule la pêche à la ligne traditionnelle est permise. Pas de pêche au filet! Le fond marin offre des richesses dans un décor de roche volcanique! Pour Pierre, c'est l'occasion de rafraîchir sa formation, son brevet, d'en profiter. En dernière minute, il a pu se greffer à un groupe de plongeurs, car les places sont chères, ici. Il a passé deux merveilleux jours. La Restinga est un tout petit village de pêcheurs, tout au sud dans un climat chaud. La route pour l'atteindre est creusée dans la lave, déserte de végétation, rude, monotone.
Et puis, au détour d'un tournant, le village apparait soudainement. L'ambiance y est bien cool, on croise énormément de plongeurs, l'activité du port est essentiellement des zodiaques chargés de plongeurs, 10 maximum qui sortent, qui rentrent mais sans excès. Je me suis bien amusée, moi aussi, en découvrant cette atmosphère. Il n'y a qu'un sentier de rando et le centre-musée qui présente le volcanisme aux canaries. Avec une vidéo très intéressante de l'éruption sous-marine de La Restinga en 2011-2012, qui dura 6 1/2 mois. Eruption qui a surpris tout le monde!Aucune manifestation au préalable.

Le port est en travaux car ils reconstruisent des pontons, détruits lors d'une précédente tempête.

Photo prise au lever du soleil.


 
Reportage de Pierre: 3 mérous, à la gueule de voyou. Seule photo nette. 



Et le soir, les plongeurs échangent leurs photos, connaissant les noms de chaque poisson, chaque corail, chaque végétal, détaillant leurs plongées, les comparant avec celles effectuées dans d'autres endroits de la planète. J'en ai appris des choses!! 
Et puis, après cette escapade de 3 jours à La Restinga, nous voilà de retour au Crok'n Roll au port La Estaca sur la côte nord-est de l'ile. 
  

C'est l'heure du ferry venant du sud de Ténériffe. Seule liaison pour atteindre l'île en bateau.

Nous avons passé 9 jours sur cette île épatante, du bout des Canaries, si sauvage. Et nous la quittons avec un dernier apéro en profitant d'un coucher de soleil dont on ne se lasse pas des couleurs.


Car, demain, nous partirons vers notre dernière île au programme: La Palma. La navigation pour l'atteindre, sera un test de navigation "au près". C'est-à-dire avec le vent de face. Je dis "test" car ce seront les conditions que nous devrions avoir pour revenir sur le continent, au Portugal. 
Je vous raconterai tout ça bientôt!

Commentaires

  1. Magnifique. 😍 Les levés de soleil top.
    J'adore le crabe à casquette...et je ne comprends toujours rien à la technique 😅 Yves.

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  2. Super de pouvoir vous suivre…belles pérégrinations 🥰

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